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16, automne 2023
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Revue internationale sur le numérique en éducation et communication
© Auteurs. Cette œuvre est distribuée sous licence Creative Commons 4.0 International.
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L’équipe de recherche souligne que, dans le contexte de cette activité, les élèves n’avaient pas d’écouteur
pour l’activité. D’un côté, cela a permis des échanges entre les élèves en immersion et l’autre qui ne l’était
pas. De l’autre, cela a entrainé un environnement de classe plus bruyant. Avec le recul, il pourrait
apparaitre souhaitable d’en faire plus une activité individuelle, et planifier une tâche secondaire pour pallier
le manque de matériel informatique
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ou encore de rendre la tâche de collaboration plus importante pendant
l’activité pour ce scénario.
Synthèse des deux scénarios
Les propos des jeunes sont unanimes sur le fait que les activités immersives ont marqué les esprits, sans
toutefois être capables d’expliciter cette perception. Toutefois, il ne semble pas que cette immersion ait
vraiment favorisé les apprentissages dans le cas 1 :
Je ne crois pas que j’ai plus appris avec ça, j’ai mieux compris. (Entrevue 1-US)
Par ailleurs, l’enseignante semble penser que l’activité a rejoint davantage les élèves sur le plan affectif,
ce qui n’a pas été mesuré et ne figurait pas dans les objectifs de l’activité. En ce qui concerne le cas 2, il
semble avoir manqué une étape pour discuter des impressions recueillies ou pour les analyser. Ainsi, les
TI semblent s’inscrire comme une étape « marquante » dans une activité, qui peut agir soit comme un
levier important ou comme une façon de rendre « tangible » l’apprentissage (Huang et Liaw, 2018), plutôt
que comme une activité entièrement autonome. Si comprendre, c’est apprendre, nous pouvons conclure
que la réalité virtuelle favorise l’apprentissage, mais les dispositifs en place n’ont pas permis de mesurer
explicitement cet apprentissage.
Conclusion
Évaluer les potentialités d’une technologie immersive en contexte de classe est complexe, puisque cela
dépend d’un grand nombre d’éléments, notamment la scénarisation des activités, le déroulement en
classe, les apprentissages visés et les choix technologiques. En conclusion, nous proposons de revenir
sur deux des trois éléments du modèle PST, soit la pédagogique et la technologie. De plus, nous porterons
un regard critique sur la mise en place d’une telle activité en contexte réel. Finalement, nous proposerons
des recommandations au regard de nos expérimentations.
Les enjeux traités dans les deux scénarios étaient en lien avec différents défis didactiques associés à
l’univers social, soit à la fois la relation temps-espace (le patrimoine) et des questions socialement vives
(tensions et conflits). Dans les deux scénarios, et plus particulièrement dans celui expérimenté par les
jeunes du premier cycle, l’immersion et la présence ressortent comme deux des trois piliers essentiels de
l’expérience en TI (le troisième étant l’interactivité), comme souligné par Mütterlein (2018). L’immersion
permet de « faire vivre » des expériences inédites aux élèves, ce qui est continuellement mentionné dans
toutes les entrevues de groupe. Les élèves pouvaient « être là » ou « voir de leurs yeux » des lieux qui
leur sont inaccessibles. Les éléments liés à la présence, à l’empathie et aux éléments affectifs ont été
prégnants, particulièrement dans le cas 2, et constituent probablement une voie prometteuse pour amorcer
une séquence d’apprentissage en engageant les apprenants sur le plan affectif. Le fait qu’ils soient plus
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Comme les groupes du secondaire sont composés de plus de 30 élèves, il n’était pas possible d’avoir un casque par élève.
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jeunes les a peut-être marqués davantage.
Sur le plan pédagogique, les scénarios pédagogiques ont permis de développer certains éléments
associés aux compétences disciplinaires, en fonction de ce qu’il a été observé dans les réponses des
guides pédagogiques et des discussions en classe. Par exemple, pour le conflit en Syrie, les élèves ont
soulevé des réflexions au regard des médias (questions 3.6 et 3.7, guide de l’élève), alors que dans le
contexte de la réflexion sur le patrimoine, les élèves ont constaté les enjeux de densité (vidéo 1 du cas 1)
ou encore de restauration (vidéo 2 du cas 2). Les vidéos étaient pertinentes et adaptées pour les élèves,
mais il nous était impossible d’en modifier la trame narrative. Par conséquent, nous étions contraints de
voir comment intégrer ce qui est dit dans notre scénario, ou encore d’ignorer l’audio. Les élèves ont
d’ailleurs déploré le manque d’interactivité, la troisième caractéristique mise en évidence par Mütterlein
(2018). Dans ce contexte, l’activité immersive n’était pas essentielle aux apprentissages, mais visait plutôt
une réappropriation de certains contenus qui ont été lus ou présentés, ce qui favoriserait un meilleur
transfert des connaissances dans l’environnement immersif (Lewis et al., 2021). Un montage personnalisé
de vidéos à 360° existantes permettrait probablement de créer des ressources plus directement utiles aux
apprentissages visés.
Sur le plan technologique, la complexité technique de la mise en place de tels scénarios demeure élevée.
Cela nous laisse quand même songeurs sur la faisabilité du déploiement d’activités immersives à large
échelle dans les classes actuelles. L’accompagnement en classe (présence d’un conseiller ou d’un agent
de la recherche) est incontournable pour faciliter la mise en place de l’activité. Il faut penser à la charge
des casques et des manettes, à la connectivité sur Internet, aux mises à jour et à la présence des
ressources pédagogiques sur les casques. Une fois en immersion, il est difficile de faire un étayage
efficace des apprentissages, puisqu’il était quasi impossible d’intervenir auprès des élèves, sans arrêter
constamment l’activité. Par exemple, il est arrivé à multiples reprises qu’un élève soit dans le noir pendant
plusieurs minutes, alors que le casque était encore éteint, sans même qu’il signale ce problème. Il serait
possible d’avoir des systèmes « miroirs » permettant de voir sur une tablette ce qui est vu à partir du
casque. Cela pourrait favoriser la verbalisation autour de l’expérience et ainsi que la socioconstruction des
apprentissages. Toutefois, ce type d’environnement miroir exige davantage de matériel et des
configurations techniques parfois difficiles à réconcilier avec les réseaux sans fil institutionnels.
Les deux scénarios pédagogiques expérimentés semblent prometteurs, mais pourraient être peaufinés à
la lumière de l’expérience vécue. Dans le cas n
o
1, l’enseignante a joué un rôle de plus en plus actif dans
les discussions au fur et à mesure des expérimentations. Dans le cas n
o
2, une étape de discussion ou
d’analyse sur les premières impressions semblerait pertinente. Ces éléments soulignent l’importance de
la qualité du scénario pédagogique, comme le souligne par Poellhuber et al. (sous presse).
Finalement, il nous apparait aussi essentiel de disposer d’espaces physiques aménagés pour apprendre
avec les TI et comportant le matériel requis pour faciliter et favoriser la mise en place d’expériences
enrichissantes en réalité virtuelle. Les tables de travail, les chaises et même le choix du casque sont des
contraintes dont on doit tenir compte pour le déroulement de l’activité en salle de classe. Comme indiqué,
les élèves étaient en ilots de travail et la personne avec le casque se retrouvait coupée de son
environnement physique, pouvant provoquer des contacts physiques ou des décrochages dans l’activité
(distraction par les pairs).
En conclusion, les possibilités de présence, d’empathie et de sensibilisation émotionnelle ou affective à la
réalité des autres semblent constituer des potentialités sur lesquelles il est possible d’élaborer des
situations pédagogiques pertinentes en univers social. Des scénarios pédagogiques soignés intégrant la
RV à certaines étapes semblent prometteurs. En ce qui concerne l’utilisation des TI dans d’autres