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Lecentreinternationaldu
photojournalisme(CIP):un
hub
social
cultureld’éducationauxmédias
EntretienavecJean-LucSoret
TheInternationalPhotojournalismCenter:Aculturalsocialhub
formediaeducation–InterviewwithJean-LucSoret
ElCentroInternacionaldeFotoperiodismo(CIP):unhubsocial
yculturalparalaformaciónenmediosdecomunicación–
EntrevistaconJean-LucSoret
https://doi.org/10.52358/mm.vi11.325
Thierry Gobert, maître de conférences
Université Perpignan Via Domitia, France
thierry.gobert@univ-perp.fr
RÉSUMÉ
Cet entretien avec Jean-Luc Soret, directeur de l’association Visa pour l’image Perpignan,
a pour objet d’évoquer l’évolution d’une structure culturelle investie dans l’éducation aux
médias depuis le début de son histoire. En évoquant les missions de la structure, le
phénomène de concentration local et de rayonnement global ainsi que l’intégration sociale
dans les dispositifs de médiation, il explicite les caractéristiques d’un hub social culturel
éducatif.
Mots-clés : hub éducatif, hub social, hub social culturel, éducation aux médias, CIP,
photojournalisme
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ABSTRACT
This interview with Jean-Luc Soret, director of the association "Visa pour l'image - Perpignan",
aims to speak about the evolution of a cultural structure in media education since the beginning
of its history. By evoking the missions of the structure, the phenomenon of local concentration
and global influence, as well as the social integration in the mediation devices, it explains the
characteristics of an educational, cultural, and social hub.
Keywords: educational hub, social hub, cultural social hub, media education, CIP,
photojournalism
RESUMEN
Esta entrevista con Jean-Luc Soret, director de la asociación «Visa pour l’image Perpignan»,
tiene como objetivo tratar la evolución de una estructura cultural dedicada, desde sus
principios, a la educación sobre los medios de comunicación. Evocando las misiones de la
estructura, del fenómeno de concentración local y de proyección global, así como la
integración social en los dispositivos de mediación, explicita los rasgos de un hub social
cultural educativo.
Palabras clave: hub educativo, hub social, hub social cultural, educación en medios de
comunicación, CIP, fotoperiodismo
Jean-Luc Soret est directeur de l’association Visa pour l’image Perpignan, et anime le Centre
international du photojournalisme, Perpignan, France.
Les hubs éducatifs sont généralement compris comme des lieux physiques ou virtuels de concentration
de données, de compétences, d’apprenants et d’équipes pédagogiques dans un lieu identifié. Ce sont des
espaces de convergence et de rayonnement. Certains mettent en avant une dimension sociale qui se
manifeste par la communication assumée de leur éthique, de valeurs consensuelles et de la qualité des
relations entretenues en interne et vis-à-vis des partenaires. Ces hubs sociaux abordent diverses
thématiques et touchent tous les publics tant à distance qu’en présentiel. C’est pourquoi l’entretien qui va
suivre a été conduit avec le directeur d’une association dont l’une des missions structurantes, outre la
conservation d’un important fonds photographique et le soutien du festival international « Visa pour
l’image », est l’éducation aux médias et à l’information.
Comme nombre de lieux culturels, le Centre international du photojournalisme (CIP) est un hub entré dans
une dynamique d’évolution de ses activités telles qu’elles pourraient être décrites dans le cadre d’un hub
social éducatif. Le directeur de la structure évoque les stratégies de développement à partir d’un ancrage
fort sur le territoire qui rayonne à l’international. Si des médias d’affichage comme un site Internet existent
longtemps, la mise en œuvre des dispositifs socionumériques est récente. Elle crée des situations et des
potentialités nouvelles, en termes de mixités des publics, d’approches expologiques et pédagogiques.
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Thierry Gobert Pourriez-vous vous présenter brièvement afin que les lecteurs puissent vous
situer?
JEAN-LUC SORET
Je dirige l'association Visa pour l'image Perpignan depuis le début de l’année 2022.
Auparavant, j’ai été pendant plus de 20 ans commissaire d'exposition à la Maison européenne de la
photographie
1
à Paris. Dans cette organisation, j’ai pu couvrir tous les champs du langage
photographique : du photojournalisme, en passant par la photographie d'auteur, la photographie de mode,
la photographie plasticienne, l’imagerie numérique ou la postphotographie, en hybridant parfois ces
pratiques aux domaines des arts et des technosciences.
Thierry Gobert Qu’est-ce que l’association Visa pour l’image?
JEAN-LUC SORET
Tout d’abord, Visa pour l’image Perpignan est une association loi 1901, soutenue
par l’État, le ministère de la Culture, la Ville de Perpignan, la Région Occitanie, le Département des
Pyrénées-Orientales, Perpignan Méditerranée Métropole, la Chambre de commerce et d’industrie des
Pyrénées-Orientales et de très nombreux partenaires privés. L’association s’est donné plusieurs missions.
La première d’entre elles est de mettre toutes ses forces vives, humaines, organisationnelles et
financières, au service du festival international Visa pour l'image
2
et donc du travail de Jean-François
Leroy
3
, qui en est le fondateur et le directeur artistique, ainsi que de son équipe.
Le reste de l'année, ma mission est d'animer le Centre international du photojournalisme (CiP)
4
, qui repose
sur trois axes majeurs. Le premier est la mise en place d’un cycle d'expositions qui va devenir trimestriel.
Ces expositions vont investir une bonne partie des superbes espaces du couvent des Minimes et notre
rez-de-chaussée. Le deuxième réside dans l’organisation d’actions pédagogiques d'éducation à l'image et
à l'information tout au long de l'année. Elles concernent tous les publics, les jeunes comme les moins
jeunes, les néophytes comme ceux qui bénéficient déjà d’une expertise et qui souhaitent l’approfondir
auprès de nous. Le troisième levier d’action est la poursuite de la constitution d’un fonds photographique
des photojournalistes, la conservation des clichés et leur valorisation.
Thierry Gobert Je vous propose d’évoquer ensemble les actions de l’association au regard du
concept de hub social que nous avions abordé il y a quelques mois ensemble.
JEAN-LUC SORET
Oui, bien sûr. Les actions qui participent de cette dynamique relèvent de plusieurs
niveaux. Le concept de « hub » peut être illustré par le fait que la recherche muséale propre à tout projet
d’exposition et la sélection des projets reposent sur l’activation de réseaux de connaissances à l’échelle
locale, nationale et internationale. Je suis très attaché au fait que chacune des expositions ait un ancrage
territorial tout en étant ouverte sur la totalité de la planète. L’ADN de Visa pour l’image, c'est d'être en
phase directe avec les pulsations du monde.
1
https://www.mep-fr.org
2
https://www.visapourlimage.com
3
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-François_Leroy_(photographe)
4
https://photo-journalisme.org/fr/a-propos /
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Thierry Gobert Dans un premier temps, voyez-vous le CIP comme un hub par ses aspects
géographiques dans la conception des expositions et pluridisciplinaire pour les activités de
recherche?
JEAN-LUC SORET
Oui. Par exemple, dans le cadre de la collaboration avec l’Université Perpignan Via
Domitia (UPVD) qui est un acteur du territoire, l’idée est de favoriser la recherche sur des thématiques
abordées au festival Visa pour l'image pour approfondir la réflexion sur les travaux exposés.
Sur le fond, le point de départ pourrait être l'actualité chaude, matière première du photojournalisme, mais
elle sera recontextualisée, fera l’objet d’analyses propices à l’approfondissement de notions clés
développées avec des chercheurs. Des théoriciens de l’image, des historiens, des prospectivistes, des
universitaires de diverses disciplines comme les sciences de l’information et de l’éducation, pourraient
rencontrer des professionnels de la photographie. C’est d’ailleurs ce qui se passe déjà lors des colloques
annuels que nous coorganisons en septembre avec votre université et qui sont consacrés à des notions
qui interrogent les médias et l’image contemporaine. Il nous appartiendra de développer ces
collaborations, voire de monter un projet de publications qui pourrait accompagner chacune des éditions
thématiques.
Je compte communiquer mes axes de recherche et de programmations suffisamment en avance pour
solliciter des papiers des enseignants-chercheurs de l’UPVD. Cela dit, je ne m'interdis pas de solliciter des
papiers relatifs à des interventions de chercheurs et de scientifiques issus d’autres universités françaises
et internationales, parce que le CIP a pour vocation d’être un partenaire et une ressource pour le milieu
académique. Cela me semble extrêmement important que des chercheurs en photographie, en
photojournalisme et même en droit soient conscients que le CIP a pour vocation d’être un centre de
ressources par ses expositions, sa politique éditoriale, les réflexions engagées ou ses actions
pédagogiques. J'aimerais que des travaux de sociologie et d’autres disciplines de sciences humaines et
sociales viennent s'interroger sur le photojournalisme, les expositions, le fonds photographique, les
stratégies de valorisation tant du côté de la prise de vue que de celui de la réception.
Pour revenir à la notion de hub, l’une des missions du CIP sera de faire voyager les expositions sur le
territoire et au-delà, comme à Gérone où nous avons signé un partenariat avec la Generalitat de
Catalunya. Nous souhaitons également faire voyager les expositions au niveau national, européen et
international. Il se trouve que lorsque j’étais en poste à la Maison européenne de la photographie, j’ai eu
l’opportunité de collaborer avec l’Europeen month of photography (E
MOP
)
5
. Pendant plus de dix ans,
concevoir et mettre en œuvre des projets d’exposition avec des responsables d’organisations culturelles
photographiques ou d’autres commissaires d'exposition a été extrêmement enrichissant. C’est donc tout
naturellement que je serai amené à porter à leur connaissance toutes les thématiques et expositions qui
vont être celles du CIP en les informant de l’esprit d’ouverture qui m’anime et qui pourrait ouvrir à tous
types de collaborations futures.
5
http://www.europeanmonthofphotography.org/?attachment_id=1066
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Thierry Gobert Jusqu’à présent vous avez évoqué la notion de hub comme un concentrateur
d’éléments liés aux activités de l’image, du photojournalisme, du festival Visa et rapidement de la
pédagogie en la citant comme l’un des axes majeurs du CIP. Comment abordez-vous la partie
sociale du hub social? Nous pourrions commencer en évoquant l’intégration des réseaux sociaux.
JEAN-LUC SORET
La stratégie du CIP compte bien évidemment intégrer les réseaux sociaux et tous les
potentiels des environnements numériques pour compléter ses actions en proposant des podcasts, des
interviews filmées, du contenu éditorialisé en fonction des expositions présentées. Les réseaux sociaux
ne sont pas simplement un levier de communication, ils permettent également de mettre en œuvre des
actions de médiation porteuses de clés d’interprétation de l’image.
Par exemple, une exposition, qu’elle soit physique ou dématérialisée, pourrait faire l'objet d’une série de
contenus vidéo, audio, chapitrés de façon à s'accorder aux us de tous les publics. Certaines études
sociologiques font apparaître que le jeune public est plus « multitâche », familier d’un environnement
« multiécrans » et peut donc être particulièrement sensible à un contenu segmenté, chapitré, court et
synthétique. Inversement, nous pourrions mettre en ligne une conférence d’une heure et demie qui, elle,
intéressera plus probablement un enseignant-chercheur, un étudiant ou un passionné.
À moyen terme, Renaud Donnedieu de Vabres
6
et moi-même aimerions également que le CIP propose
des expositions en ligne, investisse la réalité virtuelle ou le détournement des technologies liées aux jeux
vidéo comme le machinima pour élargir ce qui définit la pratique photojournalistique, explorer des formes
expérimentales d’exposition et toucher d’autres typologies de publics.
Thierry Gobert Quelles pistes envisagez-vous pour que les échanges, cette fois, s’effectuent au
niveau social entre les destinataires de toutes ces actions, d’autant plus qu’elles sont adaptées à
différents publics?
JEAN-LUC SORET
Cela fait également partie du projet à moyen terme. Du temps sera nécessaire pour
le mettre en place, avec le soutien des collectivités et des partenaires privés. Il s’agit de construire un
projet culturel autour du CIP, un projet qui aurait à cœur de mixer les publics et de même des activités
complètement connexes au domaine de la photographie ou du photojournalisme. Le centre est contigu au
couvent des Minimes qui est un lieu du patrimoine absolument extraordinaire avec un patio à ciel ouvert
splendide, un énorme parvis. Nous pourrions très bien imaginer des actions croisées avec les autres
acteurs culturels de Perpignan pour événementialiser ce lieu et l’ancrer davantage dans les habitudes
culturelles des Perpignanais. On commencera de façon progressive, bien sûr, pour voir si ces initiatives
font venir du public et comment les personnes communiquent entre elles à propos de nos initiatives et des
contenus qu’elles auront vus.
Il faudrait que l’on puisse proposer des espaces de convivialité au public qui vient visiter nos expositions,
comme c’est le cas pendant le festival Visa pour l’image, où l’on peut s’asseoir à une table, prendre un thé
ou un café et échanger autour d’un verre. Parler de ce qui nous a émus ou de ce que l’on n’a pas aimé
est toujours appréciable dans un lieu culturel.
Les thématiques qui vont se succéder sont susceptibles de toucher des publics très différents. Je ne
m’interdis de traiter des sujets extrêmement variés. Ils iront de l’histoire de la représentation de la violence
au statut du corps travers le sport, le corps prothésé, le corps augmenté, le posthumanisme), des
6
Président de l’association Visa pour l’image Perpignan. Ministre français de la Culture et de la Communication de 2004 à 2007.
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moyens de faire face à la crise climatique à ceux qui permettront de maîtriser l’emprise des nouvelles
technologies sur nos vies. Je vais commencer évidemment par ce qui est pour moi le premier chapitre,
celui qui consacre l’engagement de femmes et d’hommes qui photographient les soubresauts du monde,
les conflits et les guerres au péril de leur vie et, parfois, qui la sacrifient. Ce chapitre sera consacré à la
représentation de la violence avec un coup de chapeau à toute la profession du photojournalisme.
Donc ce projet, activement soutenu par le président de l’association, Renaud Donnedieu de Vabres, par
les membres du conseil d’administration et par nos partenaires, a pour vocation d’intéresser tous les
publics, en présentant des thématiques et un traitement qui soient vraiment accessibles à tous. Je veux
mettre en place une approche pluridisciplinaire pour interroger le photojournalisme dans tous ses points
de contact avec les autres pratiques photographiques, mais aussi les autres pratiques artistiques. Cette
orientation est intéressante également pour les ateliers pédagogiques qui peuvent ouvrir les champs et
mixer les bénéficiaires.
Par ailleurs, le vaste parvis du couvent des Minimes pourrait accueillir des initiatives éclectiques; il pourrait
même accueillir un marché de producteurs locaux! On pourrait très bien faire venir des exploitants du
territoire pour diversifier les raisons de venir au CIP : aller faire ses courses, venir voir une exposition de
photos, boire un café et voir une performance pourrait rassembler des publics variés. Ensuite, l'après-midi,
on pourrait encore se rendre dans une autre organisation culturelle pour assister à un spectacle ou à un
film. J’ai tout cela en tête quand je vous parle d’événementialiser ce lieu. Cela devrait pouvoir se réaliser
en étroite collaboration avec les partenaires institutionnels de l’association et les autres acteurs culturels;
cela me semble être une piste intéressante à creuser. Nous verrons si l’expérience nous donne raison ou
s’il faut changer nos axes d’expérimentation.
Thierry Gobert Sur Internet, la plupart des structures qui abondent dans le sens d’une identité
de hub social, aujourd’hui, mettent en avant des valeurs, de l'éthique.
JEAN-LUC SORET
Oui. Bien sûr. La liberté d'expression est vraiment le cœur battant de Visa pour
l'image. C'est une évidence, mais cest quand même bien de le rappeler, surtout dans le contexte actuel.
Le site web du Centre international du photojournalisme propose une charte de déontologie de la
profession. Cela infuse aussi les actions pédagogiques destinées à tous les publics, des jeunes jusquaux
moins jeunes, sans oublier les publics empêchés.
Cela dit, même si nous avons dans toute l’équipe à l’esprit des valeurs et une éthique, je me garderais
bien, à titre personnel, de faire la promotion d’une vertu trop revendicative. Tendre vers un rapport vertueux
au monde n’est pas forcément l’atteindre. L’important, c’est le chemin qui y mène. L’association tendra,
par exemple, vers une sorte d’écoresponsabilité dans la conception de ses projets, dans la réalisation de
ses expositions. J’essaierai, dans la conception des expositions, de faire très attention au recyclage des
éléments scénographiques, aux systèmes d’éclairage les moins énergivores, à la façon de pouvoir
économiser le plus possible sur les transports des photojournalistes éloignés, que ce soit pour la
préparation de l’exposition ou même celle de colloques. La crise de COVID nous a appris à composer
avec d’autres formes de présence que je compte continuer d’utiliser.
Mais il y a toujours plus vertueux que soi, et il peut nous arriver d’être animés, pour la plupart d’entre nous,
d’élans contradictoires. Si tendu que l’on soit vers la vertu écologique, nous produisons une quantité
conséquente de déchets plastiques, carburons à l’énergie fossile ou nucléaire, sommes collés à nos
interfaces mobiles et autres outils technologiques dont on peut vraiment discuter les bilans humains et
carbone. Nous voulons tous mieux faire, mais brandir un étendard et se présenter comme un parangon
de vertu, je préfère éviter. Je me méfie également d’une certaine moraline et de tous ceux qui déclarent
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détenir la vérité pour tenter d’imposer leurs vues, d’instrumentaliser la notion de vérité pour asseoir un
pouvoir.
L'écologie, parmi d’autres thèmes, fera évidemment l'objet de cycles récurrents d'expositions trimestrielles.
Je ne cesserai de creuser ces sujets pour gagner en profondeur au fil du temps en enrichissant, pas à
pas, la réflexion dans le temps long de la recherche.
Thierry Gobert Nous avons parlé de responsabilité écologique. C’est désormais la première
association à laquelle nous pensons, tant le terme est associé au développement durable. Mais
vous avez également fait allusion avant cet entretien à une responsabilianthropologique qui peut
se manifester dans votre mission de préservation de la mémoire avec les collections du CIP. Cette
forme de responsabilité implique un respect des personnes, des photographes, de leurs ayants
droit, et même des publics qui verront les expositions composées sur la base de ce fond.
JEAN-LUC SORET
Comme je l'ai rappelé récemment dans une intervention, en introduction au colloque
sur l’inaperçu
7
dans l’image qui s’est tenu au Campus Mailly, j'appelle de mes vœux une collaboration
extrêmement étroite avec l’université. Cette collaboration sera utile pour évoquer les questions liées à la
conservation d’un patrimoine mémoriel spécifique qui porte sur la liberté d'expression telle qu'elle a été
couverte par les photographes. Nous défendons les photojournalistes. Aussi, la mission du CIP, c'est d'être
une chambre d'écho du festival Visa pour l’image, sans forcément le traiter, ni sur le fond ni sur la forme,
comme le fait Jean-François Leroy. Cette complémentarité participe justement de la richesse de l'action
de l’association.
Une de nos responsabilités se manifeste dans la volonté de contextualiser, d'analyser et bien sûr de
conserver correctement le patrimoine photographique. Cela va être une mission complexe parce que nous
n'avons pas, à l’heure je vous parle, de lieu qui obéisse aux standards de conservation préventive et
de stockage des photographies. C'est aussi l’une des missions auxquelles je vais m’attaquer, avec le
soutien de professionnels en conservation du patrimoine et la collaboration active des archives
départementales des Pyrénées-Orientales.
Thierry Gobert Est-ce que l’on pourra bientôt parler du CIP comme d’un hub social éducatif et
culturel?
JEAN-LUC SORET
Je l'espère. Je l'espère parce que, comme je vous l'ai dit, j’aimerais contribuer à faire
de ce lieu un espace qui soit en osmose avec tout le tissu social qui l'environne tout en proposant une
programmation ouverte à linternational. J’aimerais que ce lieu mette en avant des approches culturelles
interdisciplinaires en maillage étroit avec la photo, le photojournalisme, et en capillarité avec le territoire.
7
https://www.univ-perp.fr/fr/cresem-colloque-international-linapercu