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Lesmodalitésd’évaluationdes
apprentissagesàl’enseignementsupérieur
L’apportdelaconceptionuniverselledel’apprentissage
(CUA)dansuncontexteinclusifd’enseignement
àdistance
Assessmentoflearninginhighereducation:Thecontributionof
theuniversaldesignoflearning(UDL)inaninclusivecontextof
distanceeducation
Modalidadesdeevaluacióndelaprendizajeeneducación
superior:lacontribucióndelaconcepciónuniversaldel
aprendizaje(CUA)enuncontextoinclusivodeeducacióna
distancia
https://doi.org/10.52358/mm.vi9.255
Myriam Girouard-Gagné, doctorante
Université de Montréal, Canada
myriam.girouard-gagne@umontreal.ca
Micheline Joanne Durand, professeure
Université de Montréal, Canada
mj.durand@umontreal.ca
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RÉSUMÉ
La variabilité des apprenants fréquentant les établissements universitaires et l’essor de la
formation en ligne en situation de crise sanitaire amènent les enseignants à se questionner
sur leurs pratiques. Relativement à l’évaluation des apprentissages, des questions se posent
concernant les différentes pratiques visant à réduire les inégalités. Le dispositif de formation
présenté dans cet article propose une façon de favoriser des pratiques pédagogiques actives
dans un contexte en ligne et de penser l’évaluation de manière inclusive afin de favoriser les
apprentissages et une évaluation équitable. Cette étude de cas expose la démarche effectuée
dans le cadre d’un cours au cycle supérieur en sciences de l’éducation offert à un groupe de
douze étudiants provenant de milieux différents et ayant des expériences éclectiques.
Mots-clés :
évaluation, conception universelle de l’apprentissage (CUA), enseignement
supérieur, évaluation-soutien d’apprentissage, enseignement en ligne, inclusion
ABSTRACT
The diversity of students attending universities and the rise of remote education during
uncertain times such as a global health crisis have led teachers to question their practices,
particularly the practice of assessment for learning aimed to reduce inequalities. This article
proposes a way to promote active teaching practices in a remote context and considers the
practice of learning assessment in an inclusive manner in order to promote a more inclusive
approach to learning and assessment. This case study presents the proposed process within
an Education Sciences graduate-level course offered to a group of twelve students from
different backgrounds and with broad and varied experiences.
Keywords:
assessment, Universal Design of Learning (UDL), higher education, assessment
for learning, distance éducation, inclusion
RESUMEN
La variabilidad de los aprendices matriculados en los establecimientos universitarios y el
crecimiento de la formación a distancia en una situación de crisis sanitaria condujeron al
profesorado a cuestionarse sobre sus prácticas. Con respecto a la evaluación de los
aprendizajes, las preguntas surgen a raíz de las diferentes prácticas que buscan reducir las
desigualdades. El dispositivo de formación presentado en este artículo propone una manera
de favorecer las prácticas pedagógicas activas en un contexto a distancia y de pensar la
evaluación de una manera inclusiva con el fin de favorecer los aprendizajes y una evaluación
justa. Este estudio de caso expone el procedimiento efectuado en el marco de un curso de
ciclo superior en ciencias de la educación ofrecido a un grupo de doce estudiantes
procedentes de entornos diferentes y con experiencias eclécticas.
Palabras clave:
evaluación, concepción universal del aprendizaje (CUA), educación superior,
evaluación-apoyo al aprendizaje, educación a distancia, inclusión
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Contexte
La pandémie mondiale de COVID-19 aura, en 2020, forcé la population universitaire à s’adapter
rapidement à de nouvelles modalités d’enseignement, d’apprentissage et d’évaluation. Les enjeux de
détresse psychologique (Morvan et Frajerman, 2021; Roux et al., 2021), de conciliation télétravail/études-
famille, ainsi que de plagiat lors d’examens traditionnels en ligne (Béland et al., 2021) ont soulevé des
défis importants pour une formation de qualité, ce qui a amené les formateurs universitaires à se
questionner sur leurs pratiques évaluatives (Detroz et al., 2020). En outre, Navarro (2012) et Rizvi (2018)
remettent en question les pratiques pédagogiques traditionnelles en mettant en évidence la problématique
de l’équité en évaluation compte tenu des besoins variés de la population étudiante, susceptible d’être
palliée par des pratiques inclusives qui, comme l’ajoute La Grenade (2017, p. 38), s’adressent à l’ensemble
de la diversité et non seulement aux étudiants en situation de handicap. Entre autres, des modalités
d’évaluation en soutien à l’apprentissage permettent de considérer la diversité des besoins et intérêts de
la clientèle étudiante en favorisant la régulation de l’apprentissage, la motivation et l’engagement
(Philion et al., 2012; Rizvi, 2018).
Considérant les défis inhérents au contexte présenté, nous croyons pertinent de décrire la mise en place
d’un cours qui a été transféré complètement en ligne et qui respecte les principes de l’évaluation et de
l’enseignement inclusifs. Cet article développe d’abord les concepts d’évaluation au service de
l’apprentissage et les principes de la conception universelle de l’apprentissage (CUA) qui guident les
pratiques pédagogiques et évaluatives mises en place dans ce cours. Le déroulement du dispositif de
formation est ensuite exposé, complété par des éléments de discussion autour des implications pour
l’enseignement supérieur, particulièrement dans le contexte de la formation et de l’évaluation en ligne.
Enjeux
La pédagogie inclusive est, dans la littérature scientifique mondiale, mais particulièrement nord-
américaine, largement abordée en utilisant le cadre de la CUA (Stentiford et Koutsouris, 2020). La CUA
se définit, selon Maxam et Henderson (2013), comme un ensemble de principes visant la flexibilité et la
diversité des environnements d’apprentissage pour une pédagogie accessible à tous, et ce, peu importe
les modes d’apprentissage ou les besoins particuliers. En d’autres mots, il s’agit d’un cadre permettant de
planifier les activités d’enseignement, d’apprentissage et d’évaluation de manière flexible et variée afin de
répondre aux besoins et intérêts du plus grand nombre. Les principes de la CUA reposent sur la variété
des moyens de représentations (P1), d’actions et d’expressions (P2), et d’engagement (P3) (CAST, 2011).
Par exemple, l’utilisation des outils technologiques permet de considérer la diversité en fournissant des
moyens variés de présenter l’information et en permettant aux apprenants de démontrer leurs acquis de
diverses façons.
Pour mettre en œuvre une évaluation alignée avec les principes de la CUA, trois impératifs sont rapportés
par Rose et ses collègues (2018) :
1) l’évaluation est incluse dans l’expérience d’apprentissage et en est indissociable;
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2) l’environnement d’apprentissage permet aux apprenants de faire des choix dans les tâches
évaluatives afin d’optimiser les performances de tous et de diminuer les obstacles potentiels;
et
3) de la rétroaction à partir d’évaluations fréquentes et continues est disponible pour les
apprenants afin d’identifier leurs forces et leurs défis, ainsi que les prochaines étapes à
franchir.
Ces trois caractéristiques s’accordent sur plusieurs points à celles de l’évaluation-soutien d’apprentissage
(ÉsA), traduction proposée par Allal et Laveault (2009) de l’Assessment for learning. Cette approche est
constituée des pratiques quotidiennes engageant les membres de la classe, seuls ou en interaction, à
réfléchir, rechercher et réagir à la suite d’échanges et d’observations dans le but de soutenir les
apprentissages en cours (Allal et Laveault, 2009). Plus spécifiquement, dans cette approche :
1) les tâches évaluatives sont intégrées aux tâches d’apprentissage, elles sont distribuées sur
l’ensemble de la démarche d’apprentissage dans des situations complexes et authentiques
où le droit à l’erreur est reconnu;
2) l’apprenant est actif et indépendant, il peut s’autoévaluer et évaluer ses pairs afin de réguler
les apprentissages;
3) les rétroactions sont constructives et sont utilisées pour améliorer l’apprentissage, c’est-
dire qu’elles sont réinvesties dans le processus d’apprentissage l’apprenant a l’occasion
d’apporter les ajustements nécessaires.
Ainsi, l’approche d’ÉsA et les principes de la CUA fournissent des pistes pour adopter un processus
d’évaluation inclusif ayant pour principal objectif d’aider les apprenants à apprendre (Philip, 2013) en
tenant compte de l’hétérogénéité des besoins et des intérêts par des tâches variées et différenciées
favorisant l’autorégulation. À la lumière de ce qui précède, la question suivante se pose :
Comment le corps enseignant universitaire met-il en place des pratiques inclusives pour tenir compte des
besoins de tous les apprenants dans un contexte en ligne, spécifiquement dans le processus d’évaluation?
Méthodologie et dispositif
Le cas d’un cours de deuxième cycle dans le programme en évaluation des compétences sera détaillé
dans le but d’offrir un exemple de pratiques évaluatives intégrées au processus d’apprentissage exploitant
les principes de la CUA dans une modalité en ligne. La professeure s’est présentée comme un cas expert
pour observer le transfert d’un cours entièrement en ligne à l’automne 2020 dans le contexte de la
pandémie en conservant une approche inclusive et pédocentrée qui avait sa raison d’être en classe. Le
cours a été donné à 12 personnes provenant de différents programmes une fois par semaine sur
15 semaines, incluant une semaine de lecture. L’analyse du plan de cours et de la plateforme utilisée pour
la formation en ligne, des observations sur les activités d’apprentissage et d’évaluation, ainsi que les
réponses à un questionnaire rempli par 7 des 12 participants au cours ont été utilisées comme outils de
collecte de données pour répondre à la question susmentionnée.
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La section suivante présente d’abord le plan de cours élaboré par la professeure pour transférer son cours
entièrement en ligne ainsi que chacune des modalités d’apprentissage proposées. Ensuite, les modalités
d’évaluation dans une perspective de soutien aux apprentissages sont décrites.
Le plan de cours
Le plan de cours proposé pour le transfert du cours entièrement en ligne (figure 1) met en évidence les
différents formats proposés, soit six séances en visioconférence synchrones, ainsi que huit séances
asynchrones, dont deux impliquant un travail collaboratif, quatre prenant la forme d’un module
d’autoformation et deux réservées à la participation à un forum de discussion. La variété des formats
offerts permet de varier les moyens d’engagement (P3) favorisant ainsi l’intérêt et la motivation des
étudiants (Desmarais et al., 2020).
Figure 1
Structure du cours
LES VISIOCONFÉRENCES
Les visioconférences ont pour objectif de présenter le contenu essentiel du cours et de permettre à la
professeure de soutenir les apprentissages dans les travaux collaboratifs en fonction des besoins
exprimés. L’enseignement ainsi effectué complète les lectures prévues au plan de cours et déposées sur
la plateforme du cours. Les rencontres synchrones permettent de favoriser les interactions entre la
professeure et les étudiants, ainsi qu’entre les étudiants. De plus, même pour les séances prévues de
manière asynchrone, une foire aux questions hebdomadaire à chaque début de séance permet à la
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professeure de répondre aux questions des étudiants tout en expliquant de façon concise le déroulement
prévu de l’activité et la production attendue par le travail collaboratif. Par cette pratique, les moyens de
représentation sont variés selon les besoins (P1) ainsi que les moyens d’engagement (P3) en offrant la
possibilité d’échanger avec la professeure et les collègues. Cette pratique est d’ailleurs appréciée par cet
étudiant qui l’exprime dans le questionnaire :
« J'appréciais beaucoup ces sessions pour obtenir plus d'explications et aussi pour augmenter
mon sentiment d'appartenance au groupe. » (E2)
Un encadrement et une communication transparente entre l’enseignant et les étudiants en contexte de
formation en ligne sont des éléments primordiaux pour assurer l’engagement, la participation et la réussite
de tous (Karsenti, 2003).
LES TRAVAUX COLLABORATIFS
Six travaux collaboratifs pour lesquels les étudiants sont regroupés par la professeure en équipe de trois,
en fonction des caractéristiques et intérêts communs, sont prévus à divers moments durant la session.
Ceux-ci offrent un choix entre deux thématiques sur lequel les coéquipiers doivent s’entendre afin de tenir
compte des parcours variés des étudiants (P3). D’ailleurs, offrir des choix sur les contenus permet aux
étudiants d’avoir un sentiment de contrôle sur la tâche, ce qui favorise la motivation et l’engagement
(Dallaire et al., 2017; Davies et LeMahieu, 2003; Viau, 2005). De plus, les tâches réalisées lors des travaux
collaboratifs sont diversifiées d’une séance à l’autre, ce qui permet d’offrir des moyens d’expression et
d’action variés pour les étudiants (P2). Finalement, la collaboration est un facteur reconnu bénéfique pour
l’apprentissage (Morrissette, 2010; Prud’homme et al., 2011), l’engagement et la motivation des étudiants
(Walckiers et De Praetere, 2004). Dans une perspective socioconstructiviste, on reconnait la cocréation
de connaissances par la collaboration entre les étudiants (Marion, 2007), ce que certains étudiants du
cours ont reconnu :
« Le fait de travailler en collaboration m'a amené à être plus engagé afin d'éviter de laisser tout le
travail à mes collègues. J'étais moins portée à tourner les coins ronds. » (E1)
« La collaboration et le travail d’équipe m’ont gardé engagé. » (E7)
« On a pu discuter et débattre de certains éléments que nous ne comprenions pas de la même
façon. Nous avons développé un bel esprit d'équipe et d'entraide. » (E1)
« Les différentes activités collaboratives dans le cadre de ce cours sont très pertinentes. » (E5)
LES MODULES D’AUTOFORMATION
Les modules d’autoformation peuvent être réalisés seul ou en équipe. Ce choix permet une plus grande
flexibilité dans les moyens d’engagement (P3). Cette pratique offre aux étudiants une plus grande marge
de manœuvre pour gérer leur temps entre leur scolarité, leur vie sociale et familiale, et leur vie
professionnelle (Chomienne et Poellhuber, 2009; Walckiers et De Praetere, 2004).
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LES FORUMS DE DISCUSSION
Les séances asynchrones réservées à la participation à un forum de discussion consistent à choisir un
article parmi cinq, d’en faire une lecture critique et d’inscrire sur le forum des commentaires, des questions
ou des réactions aux propos des collègues. Cinq jours sont alloués pour inscrire un premier message sur
le forum puis répondre au moins à deux reprises aux collègues qui ont lu le même article de façon à
instaurer une discussion critique autour des propos des auteurs. Encore ici, cette activité propose un
moyen varié de représenter les contenus (P1) et d’exprimer sa compréhension de ceux-ci (P2).
L’évaluation
Finalement, l’évaluation est un aspect central dans l’apprentissage des étudiants, car elle influence la
manière dont ils s’engagent dans leurs apprentissages (Butler, 2005; Laveault et Allal, 2016; Sambell et
al., 2013). Une approche inclusive de l’évaluation s’intéresse particulièrement à la manière de soutenir les
apprentissages (Philip, 2013; Rose et al., 2018). De ce fait, la professeure s’assure :
d’indiquer clairement les critères d’évaluation dans le plan de cours pour chacune des modalités
d’évaluation demandées;
de rédiger des annotations (rétroactions écrites) de types métacognitif et constructif sur les différents
travaux collaboratifs notamment avec la fonction révision des traitements de texte;
de proposer des rétroactions (feedback) sur les travaux;
d’amener les étudiants à faire le point sur les travaux réalisés à l’aide de grilles d’autoévaluation ou
d’un questionnaire métacognitif et en tenir compte dans leur évaluation;
de proposer une grille descriptive critériée qui servira à l’évaluation de la tâche pouvant aussi soutenir
l’étudiant pour réaliser son autoévaluation.
Ces pratiques générales sont réalisées et approfondies de manière variée pour chacune des trois
modalités d’évaluation, ce qui contribue à rejoindre les principes de la CUA.
PREMIÈRE MODALITÉ D’ÉVALUATION : LA TROUSSE D’ÉVALUATION POUR L’ÉVALUATEUR (40 %)
Cette tâche consiste à choisir six des dix travaux réalisés (travaux collaboratifs et modules d’autoformation)
et à apporter un regard réflexif sur ceux-ci en justifiant l’apport de chaque travail quant aux apprentissages
effectués. De plus, l’étudiant a l’occasion d’effectuer des modifications aux travaux en fonction des
rétroactions hebdomadaires reçues. De ce fait, l’évaluation soutient réellement l’apprentissage des
étudiants, puisque ceux-ci réinvestissent les rétroactions dans l’action pour s’améliorer (Carless, 2015),
ce qui en fait une modalité d’évaluation inclusive (Rose et al., 2018). D’ailleurs, toutes les personnes ayant
répondu au questionnaire indiquent que la rétroaction reçue tout au long de la session leur a permis
d’identifier leurs erreurs et d’ajuster leur démarche, ce qui est affirmé dans le commentaire suivant :
« Les commentaires dans les différents ateliers étaient très pertinents et me guidaient bien sur ce
que j'avais à améliorer. » (E1)
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En ce sens, un autre étudiant soulève aussi l’aspect engageant de cette pratique qui favorise une
implication active dans chaque séance :
« Tout à fait, c’est un élément [les travaux collaboratifs] important pour garder l’engagement et
l’implication, et l’apprentissage en particulier avec des travaux à remettre chaque semaine. » (E5)
Ainsi, amener l’étudiant à réfléchir sur le choix des travaux qu’il souhaite déposer afin de démontrer le
développement et la maitrise de sa compétence favorise aussi l’autorégulation, élément central dans la
mise en œuvre d’évaluation-soutien d’apprentissage (ÉsA) (Allal et Laveault, 2009).
DEUXIÈME MODALITÉ D’ÉVALUATION : SYNTHÈSE CRITIQUE SUR UN ARTICLE ABORDÉ LORS D’UN
FORUM DE DISCUSSION (20 %)
Les deux séances réservées à la participation aux forums de discussion servent à la réalisation d’une
réflexion critique sur un des articles lus en tenant compte des propos des auteurs et des échanges entre
les collègues. Lors des forums, la professeure rétroagit aux commentaires des apprenants pour orienter
la réflexion et rectifier certaines conceptions. Avant la participation au deuxième forum, une première
critique est remise à la professeure pour évaluation, et ainsi obtenir des rétroactions sur le travail et les
réinvestir dans la deuxième réflexion critique pour s’améliorer. Cette pratique permet aux apprenants de
recevoir de la rétroaction à la fois de leurs pairs et de l’enseignante sur leur réflexion ainsi que de reprendre
l’argumentation de leurs collègues pour enrichir leur propre perception. De cette façon, l’évaluation est
intégrée à l’apprentissage et la rétroaction reçue offre l’occasion de se reprendre, ce qui caractérise
l’évaluation inclusive (Rose et al., 2018). Ainsi, même avec cette modalité asynchrone, les personnes
participant au cours collaborent et profitent d’une discussion riche pour développer une réflexion critique.
TROISIÈME MODALITÉ D’ÉVALUATION : INSTRUMENTS D’ÉVALUATION NOVATEURS (40 %)
Pour la tâche finale, les apprenants doivent choisir entre 1) présenter un instrument d’évaluation novateur,
2) appliquer un instrument d’évaluation dans leur contexte professionnel ou 3) élaborer une situation
d’évaluation applicable à leur contexte professionnel. Ces trois options permettent de tenir compte de la
variabilité des apprenants et de diversifier les moyens d’action et d’expression (P2). Le travail est présenté
sous forme de présentation narrée de dix minutes qui, en plus d’être évaluée par la professeure, fait l’objet
d’une coévaluation par les pairs, ce qui représente 10 % du résultat de l’étudiant-évaluateur. L’évaluation
par les pairs permet d’engager les pairs comme ressources pour les autres et de favoriser l’autorégulation,
soit une caractéristique importante de l’évaluation-soutien d’apprentissage (Allal et Laveault, 2009). Nous
pouvons assurément penser que la grande majorité peut choisir une modalité d’évaluation dans laquelle
elle pense pouvoir s’engager et s’exprimer de façon plus optimale. D’ailleurs, l’appréciation de cette
pratique est exprimée dans ce commentaire :
« Ça m'a permis d'aller chercher quelque chose qui correspondait davantage à mes intérêts et
mon contexte. » (E1)
En définitive, chacun des travaux proposés requiert des compétences différentes relativement à la
synthèse, à la rédaction, à la créativité et à la réflexivité. Toutefois, ces compétences ne sont pas celles
évaluées dans le cadre du cours, permettant d’offrir des choix tout en ayant des attentes élevées et
uniformes quant aux contenus du cours. Il est démontré qu’offrir un choix favorise un plus grand
engagement et une meilleure appropriation des contenus (Dallaire et al., 2017; Davies et LeMahieu, 2003;
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Viau, 2005). L’enseignant peut donc répondre à la variabilité des apprenants par la flexibilité et la diversité
des modalités d’évaluation. De plus, des pratiques évaluatives alternatives contribuent, dans un contexte
de formation en ligne, à réduire le risque de plagiat entre les étudiants (Yilmaz, 2017). Ces pratiques
conduisent à la réalisation d’un cours de très grande qualité permettant des apprentissages significatifs :
« Excellent cours, même en ligne. Je n'ai pas eu l'impression d'avoir eu un cours de moins bonne
qualité, au contraire. L'enseignante était facile à rejoindre. » (E2)
Conclusion
Le contexte de la pandémie aura forcé des enseignants universitaires à se questionner sur les stratégies
d’enseignement et les modalités dévaluation en ligne. Or, effectuer des changements de pratiques
pédagogiques demande de repenser les pratiques évaluatives (Perrenoud, 1992). Philion et al.
(2012, p. 8) ajoutent que la finalité des programmes universitaires rend difficile l'application d’une
pédagogie inclusive :
La prise en compte des différences individuelles des étudiants interroge indéniablement de
nombreux membres du corps professoral universitaire, notamment en ce qui a trait aux mesures
d’évaluation à mettre en œuvre et aux risques inhérents que celles-ci altèrent la finali des
programmes.
Par ailleurs, Rose et al. (2018) proposent que l’évaluation inclusive réalisée selon les principes de la CUA
vise la mesure, non pas de ce que l’étudiant a acquis comme savoirs, mais plutôt de ce que l’étudiant peut
trouver, construire, appliquer et évaluer comme savoirs de manière efficace pour lui selon ses
caractéristiques personnelles, ses forces et ses limites. Ce défi a été relevé par notre professeure experte
qui a proposé des situations d'apprentissage et d’évaluation diversifiées l’engagement de l’étudiant était
important. Toutefois, le contexte de ce cours en petit groupe (12 apprenants) au deuxième cycle peut
restreindre la transférabilité de ce cas à d’autres contextes. En effet, certaines recherches montrent que
le corps enseignant en sciences de l’éducation donnant des cours avec moins d’étudiants est plus
susceptible d’adopter des pratiques non traditionnelles (Rawlusyk, 2018). Néanmoins, nous pensons que
ce cas présenté d’une professeure experte propose des pistes intéressantes pour faire un premier pas
vers des pratiques évaluatives inclusives afin de tenir compte de la variabilité des apprenants devant
nous… ou plutôt derrière leur écran!
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