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Pratiquesd’évaluationnumérique
chezlepersonnelenseignant
Versledéveloppementd’uninstrumentdemesure
Teacherdigitalassessmentpractices:Towardsthedevelopment
ofameasurementinstrument
Prácticasdeevaluacióndigitaldelosdocentes:
Haciaeldesarrollodeuninstrumentodemedición
https://doi.org/10.52358/mm.vi9.243
Jérémie Bisaillon, étudiant au doctorat
Université du Québec à Montréal, Canada
bisaillon.jeremie@courrier.uqam.ca
Edith Potvin-Rosselet, étudiante au doctorat
Université du Québec à Montréal, Canada
potvin_rosselet.edith@courrier.uqam.ca
Diane Leduc, professeure
Université du Québec à Montréal, Canada
leduc.diane@uqam.ca
RÉSUMÉ
L’article présente une synthèse de travaux effectués dans le cadre d’un stage doctoral à
l’Observatoire des pratiques innovantes d’évaluation des apprentissages (OPIEVA) de
l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Le stage portait sur le développement d’un outil
de mesure des pratiques d’évaluation numérique du personnel enseignant à tous les ordres
d’enseignement. À partir d’une recension des écrits, 11 moyens de soutenir l’évaluation à
l’aide du numérique ont été identifiés. Ces caractéristiques de l’évaluation numérique ont
permis de créer, de concert avec l’équipe de l’OPIEVA, une première version d’un
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questionnaire. En plus de définir les caractéristiques de l’évaluation numérique et de présenter
des items du questionnaire, cet article discute de la portée des travaux effectués pour la
description des pratiques enseignantes avec le numérique.
Mots-clés : évaluation numérique, pratiques d’enseignement, évaluation, numérique,
instrument de mesure, questionnaire, compétence numérique, usage numérique
ABSTRACT
The article presents a synthesis of the work done during a doctoral internship at the
Observatoire des pratiques innovantes d’évaluation des apprentissages (OPIEVA) of the
Université du Québec à Montréal (UQAM). The internship focused on developing a tool to
measure teachers' digital assessment practices at all teaching levels. From a literature review,
11 ways to support digital assessment were identified. These digital assessment
characteristics made it possible to create, together with the OPIEVA team, the first version of
a questionnaire. In addition to presenting the characteristics of digital assessment and some
questionnaire items, this text discusses the scope of work carried out for the description and
assessment of teaching practices with digital technology.
Keywords: digital assessment, teaching practice, assessment, digital, measurement
instrument, questionnaire, digital competence, digital use
RESUMEN
El artículo presenta una síntesis de los trabajos realizados durante unas prácticas doctorales
en el Observatoire des Pratiques innovantes d’Évaluation des apprentissages (OPIEVA) de la
Université du Québec à Montréal (UQAM). El trabajo se centró en el desarrollo de un
instrumento para medir las prácticas de evaluación digital de los docentes en todos los niveles
de la enseñanza. A partir de una revisión de literatura, surgieron 11 maneras de apoyar la
evaluación mediante la tecnología digital. Estas características permitieron crear, junto con el
equipo del OPIEVA, una primera versión de un cuestionario. Además de presentar las
características de la evaluación numérica y los elementos del cuestionario, este texto trata del
alcance de los trabajos realizados para la descripción y la evaluación de las prácticas de los
docentes con las herramientas digitales.
Palabras claves: evaluación digital, evaluación, digital, prácticas docentes, instrumento de
medición, cuestionario, competencia digital, uso digital
Introduction
Que ce soit, entre autres, pour des questions d’accessibilité, d’efficacité ou de validité, l’usage du
numérique pour évaluer devient de plus en plus présent et parfois même inévitable, et ce, à tous les ordres
d’enseignement (Appiah et al., 2018; Gikandi et al., 2011; JISC, 2007). Si plusieurs écrits scientifiques
recensent des caractéristiques de l’évaluation numérique (Appiah et al., 2018; Gikandi et al., 2011;
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Stödberg, 2012; Sweeny et al., 2017; Timmis et al., 2016), rares sont ceux qui proposent un outil de mesure
des pratiques d’évaluation numérique en enseignement. C’est pour répondre à ce besoin qu’un stage
doctoral a été mis en place à l’Observatoire des pratiques innovantes d’évaluation des apprentissages
(OPIEVA) de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Dans une première partie, cet article décrira le
contexte de ce stage. Dans une deuxième partie, des caractéristiques de l’évaluation numérique seront
identifiées et définies. Dans une troisième partie, le processus de collaboration qui a contribué à
l’élaboration des items d’un questionnaire visant à documenter et à analyser les pratiques d’évaluation
avec le numérique sera décrit. Des exemples de ces items selon les différentes caractéristiques seront
également présentés dans cette section. Pour terminer, l’avancement de l’élaboration du questionnaire
après la fin du stage et les retombées envisagées seront évoqués.
Contexte
Avant de présenter plus précisément les visées du stage, cette section sera l’occasion de décrire le
contexte scientifique et social dans lequel il s’inscrit. La section explicite également le processus qui a
permis d’atteindre les objectifs du stage.
Numérique et évaluation
L’évaluation est un processus de recueil et d’analyse d’informations qui amène l’enseignant ou
l’enseignante à poser un jugement sur l’apprentissage des apprenantes et des apprenants (Legendre,
2005; Leroux, 2009). Elle implique également la collecte et l’analyse d’informations par les apprenantes et
les apprenants ainsi que par l’ensemble des actrices et acteurs qui les entourent (Fontaine et Loye, 2017).
Comme le montre la figure 1, le processus d’évaluation se déroule depuis l’établissement des objectifs
d’apprentissage jusqu’à la remise des rétroactions. Spécifions d’emblée que le modèle de Martell et
Calderon (2005) a été retenu, car il permet de représenter la nature cyclique du processus. En effet, la
réflexion sur l’apprentissage et l’enseignement permettra à l’enseignante ou l’enseignant d’apporter des
changements à ses évaluations pour le futur. Il en est de même pour l’apprenante ou l’apprenant qui
s’ajustera en fonction de l’analyse des données de l’évaluation.
Figure 1
Processus d’évaluation (adapté de Martell et Calderon, 2005)
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Dans le cadre de cet article, le terme « évaluation numérique » (traduit par « e-assessment » ou « digital
assessment ») correspond à une variété d’activités effectuées autant par l’enseignante ou l’enseignant
que par l’apprenante ou l’apprenant lors desquelles le numérique
1
est utilisé pour évaluer les
apprentissages (JISC, 2007). Lors d’une telle évaluation, le numérique intervient, à divers degrés, dans
l’ensemble du processus d’évaluation (Gikandi et al., 2011; Pachler et al., 2010).
Si l’évaluation numérique est plutôt courante à l’université compte tenu des différentes modalités
proposées (hybride, distanciel, bimodal), elle est devenue inévitable à tous les ordres d’enseignement en
contexte pandémique (Lafleur et al., 2021). Sachant que le personnel enseignant ne se perçoit pas
nécessairement compétent autant pour évaluer (Fontaine et al., 2012) que pour faire usage du numérique
(Stockless et al., 2018), la combinaison de ces deux aspects de l’enseignement peut devenir
particulièrement complexe. Ainsi, il apparait opportun de s’intéresser à la réalité du terrain en matière
d’évaluation numérique.
Contexte du stage
Dans le cadre du doctorat en éducation à l’UQAM, il est attendu que les étudiantes et les étudiants réalisent
deux stages de 135 heures afin de complémenter leur formation en recherche. Plus particulièrement, le
but du stage est d’élargir les horizons quant au domaine de recherche de la thèse ou aux pratiques
méthodologiques. Pour répondre à ces exigences, l’OPIEVA est apparu comme un milieu favorable pour
obtenir une vision plus globale du domaine du numérique en étudiant l’évaluation et pour parfaire des
connaissances méthodologiques en s’intéressant à la création d’un questionnaire.
Les travaux de l’OPIEVA se consacrent aux pratiques d’évaluation innovantes à tous les ordres
d’enseignement. Par conséquent, l’intérêt de l’Observatoire pour les usages
2
du numérique quant à
l’évaluation est tout naturel. En effet, numérique et innovation sont souvent liés dans la mesure les
nouvelles technologies impliquent généralement de nouvelles pratiques (Stockless, 2016). C’est pourquoi
le stage doctoral qui a été mis en place cherchait à répondre à la question suivante : comment documenter
et analyser les pratiques d’évaluation numérique du personnel enseignant?
Pour ce faire, la création d’une « boussole», un outil d’auto-observation et de réflexion (OPIEVA, 2018), a
été amorcée dans le cadre du stage. Concrètement, cet instrument de mesure est un questionnaire en
ligne rempli par les enseignantes et les enseignants. Ceux-ci reçoivent par la suite un portrait personnalisé
de leurs pratiques et des pistes pour les diversifier. Une première boussole est d’ailleurs déjà disponible à
l’adresse suivante : https://opieva.ca/fr/boussole/. Afin de concevoir une boussole sur les usages du
numérique quant à l’évaluation, une recension des écrits sur le sujet a été effectuée dans le cadre du stage
et a permis de faire émerger 11 caractéristiques de l’évaluation numérique.
1
Le numérique englobe autant les supports technologiques (ordinateur, tablette, téléphone intelligent, TNI, console de jeux vidéo, liseuse) que
leur contenu (logiciels, applications, sites Web, jeux vidéo, livres numériques).
2
Il faut noter que dans le domaine du numérique, plutôt que de parler de pratique, les recherches utilisent généralement le terme usage,
puisque celui-ci implique l’interaction entre une personne et un objet (Béguin-Verbrugge et Kovacs, 2011).
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Processus d’élaboration
Selon Frenette et al. (2019, p.11), qui s’inspirent des travaux de DeVellis (2017), le processus d’élaboration
et de validation d’un questionnaire se décline en sept étapes :
1) Déterminer le concept à l’étude
2) Déterminer le contexte de passation
3) Générer une banque d’énoncés
4) Déterminer le format de l’échelle de réponse
5) Évaluer la banque initiale à l’aide du jugement d’experts
6) Effectuer un prétest pour accumuler des preuves préliminaires de validi
7) Effectuer la collecte de données pour accumuler des preuves de validité
Comme une boussole avait déjà été conçue par l’OPIEVA, les étapes 2 et 4 ont déjà été pensées. En effet,
le questionnaire sera accessible en ligne sur le site Web de l’Observatoire. Il s’adressera au personnel
enseignant à tous les ordres d’enseignement. De plus, le format de l’échelle a déjà été déterminé, soit une
échelle de fréquence à six niveaux. Lors du stage, les étapes 1 et 3 ont été réalisées et l’étape 5 a été
entamée.
Afin de bien circonscrire le concept de pratiques d’évaluation numérique, une recension des écrits a été
effectuée. Cette étape permet notamment de répertorier les outils déjà existants. Les références des
recensions systématiques des écrits effectuées de 2010 à 2020 ont servi de point de départ à la
constitution d’un corpus de textes. Par la suite, une recherche a été effectuée dans Google Scholar à l’aide
de mots-clés tels que «évaluation numérique», « e-assessment» et «digital assessment». Comme la
durée du stage est relativement courte, une seule base de données a été utilisée. Cependant, la
consultation de précédentes recensions des écrits sur le sujet et des écrits déjà répertoriés par l’OPIEVA
a permis de constituer un corpus de texte plutôt exhaustif. Au final, ce sont 45 textes qui ont été analysés
en faisant émaner des caractéristiques de l’évaluation numérique et des items permettant de les mesurer.
Bien que les textes répondant aux critères de la recherche étaient très nombreux, ceux abordant
explicitement les pratiques d’enseignement étaient plutôt rares. Les écrits sur les instruments de mesure
des pratiques d’évaluation numérique étaient, à notre connaissance, presque inexistants.
Plusieurs rencontres ont été effectuées avec des chercheuses, des chercheurs, des étudiantes et des
étudiants de l’OPIEVA afin d’élaborer des définitions et une première banque d’items sur les pratiques
d’évaluation numérique. Ainsi, les caractéristiques définies dans cette section et les items présentés dans
la section suivante sont non seulement issus des écrits scientifiques, mais sont également le fruit d’un
travail de collaboration avec l’équipe de l’OPIEVA.
Caractéristiques de l’évaluation numérique
À partir des écrits consultés, il est possible de constater que le numérique vient soutenir l’ensemble du
processus d’évaluation depuis la création des activités d’apprentissage jusqu’à la diffusion des
rétroactions. Il est utilisé à tous les ordres d’enseignement, et ce, dès le préscolaire (p. ex. Danniels et al.,
2020). Selon plusieurs autrices et auteurs, le numérique soutient la conception et le pilotage de
situations d’apprentissage et d’évaluation authentiques et complexes (Crisp, 2011; Csapó et al.,
2012; Gikandi et al., 2011; JISC, 2007; Ladage, s.d.; Redecker et Johannessen, 2013; Rodríguez-Gómez
et al., 2016; Sweeney et al., 2017; Timmins et al., 2016). Selon Crisp (2011), l’évaluation avec le numérique
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peut favoriser la création d’expériences qui se rapprochent du monde réel par la simulation, notamment.
Par exemple, l’utilisation d’un simulateur de vol peut amener un ou une pilote en formation à réinvestir ses
savoirs dans des situations plus complexes et réalistes.
L’adaptation et la personnalisation des évaluations aux besoins des apprenantes et des apprenants
sont souvent évoquées dans les écrits (Audet, 2011; Csapó et al., 2012; Ghouali et al., 2020; Redecker et
al., 2012; Stödberg, 2012; Xanthou, 2013). D’une part, le numérique permet une adaptation de façon
dynamique du contenu, du niveau et du rythme de l’évaluation en fonction des objectifs, des
connaissances et du profil général de l’apprenante ou de l’apprenant. Par exemple, l’utilisation d’un jeu
sérieux peut proposer des activités différentes en fonction des choix de la joueuse ou du joueur. D’autre
part, le numérique peut permettre d’atténuer certaines contraintes (distance, temps, condition physique ou
psychologique) comme l’utilisation d’un logiciel de reconnaissance vocale pouvant soutenir la lecture d’une
apprenante ou d’un apprenant dyslexique.
Selon plusieurs autrices et auteurs, le numérique favorise l’interaction entre les apprenantes, les
apprenants et l’enseignante ou l’enseignant (Audet, 2011; Berridge et al., 2012; Cubero-Ibanez et al.,
2018; Gikandi et al., 2011; Hodgson et Pang, 2012; Lafuente Martínez et al., 2015; Olofsson et al., 2011;
Sweeney et al., 2017; Timmins et al., 2016; Xanthou, 2013). Sweeney et al. (2017) constatent notamment
que le numérique facilite des moments d’échange à propos du processus d’évaluation. Par exemple, un
forum en ligne permet de discuter des critères d’évaluation. De plus, dans leur recherche Berridge et al.
(2012, p. 75) constatent que les outils numériques rendent la classe plus «interactive» et «sociale ».
Utilisé adéquatement, le numérique peut effectivement favoriser la collaboration et la communication entre
les apprenantes et les apprenants. Il suffit de penser aux logiciels de traitement de texte qui permettent de
faire un suivi des modifications parfois même en temps réel.
Le numérique peut encourager la collaboration et la communication entre les évaluatrices et les
évaluateurs (Csapó et al., 2012). Bien que cet aspect soit peu abordé dans les écrits, il reste pertinent,
puisque cette collaboration peut servir la validité de l’évaluation (Gikandi et al., 2011). De plus, le
numérique peut être utilisé afin d’échanger au sujet de l’évaluation et de partager des informations aux
professionnelles et professionnels de l’éducation. Le numérique pourrait également permettre de cocréer
des évaluations. Par conséquent, cette pratique s’inscrit dans les exigences du référentiel de compétences
professionnelles de la profession enseignante du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur
du Québec (MEES, 2020). En effet, les enseignantes et enseignants sont appelés à s’engager dans un
processus de développement professionnel et à collaborer à l’aide du numérique. Par exemple, l’utilisation
des médias sociaux peut faciliter le partage de ressources quant à l’évaluation.
Un des aspects les plus souvent évoqués dans les écrits sur l’évaluation numérique est la collecte et la
documentation des traces de l’évaluation (Csapó et al., 2012; Danniels et al., 2020; Lafuente Martínez
et al., 2015; Mettiänen, 2015; Redecker et al., 2012; Spivey et McMillan, 2014). En effet, le numérique est
utilisé afin d’observer de façon continue la progression des apprenantes et des apprenants (au niveau
individuel et au niveau du groupe). Il permet de récolter et de classer une grande quantité d’informations
sous différentes formes. Par exemple, une plateforme numérique d’apprentissage peut permettre de
récolter certaines informations sur une apprenante ou un apprenant : temps passé sur la plateforme,
ressources consultées, etc. Une fois l’information recueillie, le numérique peut faciliter l’interprétation et
le jugement de l’évaluation (Audet, 2011; Crisp, 2011; Ladage, s.d.; Lafuente Martínez et al., 2014).
Dans ce contexte, le numérique est utilisé pour analyser les traces de l’évaluation. Par exemple, un jeu-
questionnaire en ligne peut permettre d’analyser le taux de bonne réponse d’un groupe en temps réel.
Pour Audet (2011), l’accès à une grande quantité d’informations et l’analyse de traces implicites (p. ex.
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temps passé à lire un texte ou à répondre à une question d’un examen en ligne) permet de prendre
davantage en compte le processus d’apprentissage plutôt que seulement le résultat.
Si le numérique peut faciliter la collecte et l’analyse des informations pour le personnel enseignant, il peut
également rendre le processus d’évaluation visible aux apprenantes et aux apprenants (Audet, 2011;
Danniels et al., 2020; Lafuente Martínez et al., 2015). Il est alors utilisé pour donner aux apprenantes et
aux apprenants un portrait de leur performance (en temps réel ou presque) en réunissant une variété
d’informations. Comme l’indiquent Danniels et al. (2020, p.10) dans une recherche au préscolaire,
« engaging students directly with [digital] assessment evidence […] makes their learning visible to them
and leverages the power of assessment to enhance student learning». En effet, l’accès à l’ensemble des
données de l’évaluation peut favoriser la mobilisation de stratégies métacognitives par l’apprenante ou
l’apprenant; il devient alors plus facile de s’auto-observer, de s’autoévaluer et de s’ajuster, notamment.
Par exemple, la création d’un portfolio numérique peut soutenir une apprenante ou un apprenant dans la
collecte, l’observation et l’analyse des informations sur son apprentissage.
Dans le même ordre d’idée, le numérique peut simplifier l’autoévaluation, la coévaluation (Rodríguez-
Gómez et al., 2016) et l’évaluation par les pairs (Alonso-Diaz et Yuste-Tosina, 2015; Crisp, 2011;
Mettiänen, 2015; Rodríguez-Gómez et al., 2016; Rodríguez-Gómez et Ibarra-Sáiz, 2016; Sweeney et al.,
2017). Effectivement, Rodríguez-Gómez et al. (2016, p.37) soulignent que l’utilisation du numérique pour
favoriser ces stratégies d’évaluation «allow students to learn to critically analyse and assess their own
performance and that of their peers». Dans ce contexte, les outils numériques sont utilisés pour offrir une
plus grande quantité d’informations et une plus grande flexibilité afin d’auto-observer et de juger son
processus d’apprentissage (autoévaluation), de discuter et d’obtenir une compréhension commune de
l’apprentissage (coévaluation) ainsi que de produire des rétroactions pour un condisciple (évaluation par
les pairs). Par exemple, l’utilisation du blogue peut permettre à une apprenante ou un apprenant de donner
son avis en commentaire sous la publication d’un condisciple.
L’aspect de l’évaluation numérique le plus souvent abordé dans les écrits scientifiques est l’utilisation du
numérique pour fournir des rétroactions rapides, dynamiques et enrichies (Audet, 2011; Alonso-Diaz
et Yuste-Tosina, 2015; Crisp, 2011; Gikandi et al., 2011; Hodgson et Pang, 2012; Holmes, 2015; JISC,
2007; Ladage, s.d.; Lafuente Martínez et al., 2015; Rodríguez-Gómez et al., 2016; Spivey et McMillan,
2014; Stödberg, 2012; Viens et Bertrand, 2007; Wang, 2010). Pour Viens et Bertrand (2007, p. 109), le
numérique permet «d’enrichir la rétroaction, en termes de fréquence, de profondeur, de régularité, de
facilité et de personnes-ressources ». En effet, il peut permettre des rétroactions rapides (voire
immédiates) en tout temps et en tout lieu sous différentes formes (audio, vidéo, texte) par différentes
personnes (condisciple, enseignante, enseignant, parent). Par exemple, un questionnaire en ligne peut
être utilisé pour donner des indications (indices, bonne réponse) à une apprenante ou un apprenant selon
ses réponses.
L’enseignement à distance (synchrone ou asynchrone), hybride (combinaison des modalités asynchrone
et synchrone) et bimodal (combinaison des modalités en présence et à distance) est plutôt bien ancré
dans les pratiques à l’université. Ces modalités sont également devenues inévitables pour maintenir
l’enseignement aux niveaux primaire et secondaire ainsi qu’au collégial durant la pandémie de COVID-19.
Le numérique permet ainsi de diversifier les modalités d’enseignement et d’exploiter leur potentiel
pour l’évaluation (Alonso-Diaz et Yuste-Tosina, 2015; JISC, 2007; Larkin et Beatson, 2014). Par
exemple, l’utilisation de la visioconférence permettrait de créer des sous-groupes et d’enregistrer les
conversations des apprenantes et des apprenants dans le cadre d’un cours de langue. Plusieurs
recherches constatent également que le numérique est utilisé pour la gestion et l’automatisation du
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processus d’évaluation (Appiah et van Tonder, 2018; Crisp, 2011; Csapó et al., 2012; Eyal, 2012;
Kusuma Ningsih et Mulyono, 2019; JISC, 2007; Spivey et McMillan, 2014). En effet, il permet une plus
grande efficaci à toutes les étapes du processus d’évaluation. Certains aspects du processus
d’évaluation sont ainsi gérés de façon automatique afin de diminuer la charge de travail du personnel
enseignant. Comme le soulignent Appiah et van Tonder (2018, p. 1456) : «Various studies point out that
the innovativeness and significance of e-assessment depend largely on automated marking and to what
extent it eases lecturers’ workload. » Par exemple, l’utilisation d’une plateforme d’apprentissage comme
Moodle permet de diffuser l’information, de récolter les travaux et de stocker les résultats.
Questionnaire sur l’évaluation numérique
Pour chacune des 11 caractéristiques de l’évaluation numérique présentées dans la section précédente,
des usages du numérique ont été énoncés et plusieurs items ont été élaborés (étape 3 du processus
d’élaboration et de validation). Le tableau 1 présente un exemple d’item pour chacune des pratiques
d’évaluation numérique. De façon générale, les items commencent par «J’utilise le numérique» afin de
mettre l’accent sur les pratiques et plus particulièrement sur l’usage du numérique. Cette formulation
s’inspire de l’échelle développée par Law (2009) qui porte sur l’usage pédagogique du numérique en
enseignement des mathématiques.
Les items permettront de construire un questionnaire qui sera à remplir par le personnel enseignant à tous
les ordres d’enseignement au Québec et possiblement ailleurs dans la francophonie. Ils seront également
traduits en anglais. Le questionnaire sera composé d’échelles de Likert à six niveaux (étape 4 du
processus d’élaboration et de validation) :
1- Jamais
2- Très rarement
3- Rarement
4- Souvent
5- Très souvent
6- Toujours
L’utilisation d’une échelle de fréquence qui avait déjà été établie dans la précédente boussole créée par
l’OPIEVA est tout à fait pertinente pour aborder l’usage du numérique. Effectivement, pour vraiment parler
d’usage pédagogique, le numérique doit être utilisé fréquemment (Raby, 2004).
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Tableau 1
Pratiques d’évaluation numérique et exemples d’items
Pratiques d’évaluation numérique : utiliser le
numérique afin de…
Exemples d’items
1) soutenir la conception et le pilotage de
situations d’apprentissage et d’évaluation
complexes et authentiques
J’utilise des évaluations numériques qui sont en
lien avec la vie des apprenantes et des
apprenants.
2) favoriser l’adaptation et la personnalisation
des évaluations
J’utilise le numérique afin de soutenir la
différenciation pédagogique au moyen des
évaluations.
3) faciliter l’interaction entre les apprenantes, les
apprenants et l’enseignante ou l’enseignant
Je mets en place des évaluations numériques
qui permettent aux apprenantes et aux
apprenants de collaborer.
4) encourager la collaboration et la
communication entre évaluatrices et évaluateurs
Je construis mes évaluations numériques avec
des collaboratrices et des collaborateurs.
5) soutenir la collecte et la documentation des
traces de l’évaluation
J’utilise différentes sources d’informations
numériques pour évaluer.
6) faciliter l’interprétation et le jugement de
l’évaluation
J’utilise le numérique afin d’analyser les
données amassées lors des évaluations.
7) rendre le processus d’évaluation visible pour
les apprenantes et les apprenants
J’utilise le numérique afin de rendre le
processus d’évaluation visible pour les
apprenantes et les apprenants.
8) simplifier l’autoévaluation, la coévaluation et
l’évaluation par les pairs
J’utilise le numérique pour permettre aux
apprenantes et aux apprenants de
s’autoévaluer.
9) fournir des rétroactions rapides, dynamiques
et enrichies
Je fournis des rétroactions individualisées faites
à l’aide du numérique.
10)diversifier les modalités d’enseignement
J’utilise le numérique dans différents contextes
(synchrone, asynchrone, bimodale, hybride)
pour évaluer.
11) … gérer l’ensemble du processus d’évaluation et
d’en automatiser certains aspects
J’utilise le numérique pour gérer le processus
d’évaluation.
Ces items ont été proposés à l’équipe de l’OPIEVA à l’UQAM et, en cohérence avec le processus
d’élaboration et de vali